lundi 3 novembre 2008

Sur les flots de l'épreuve

Au cours du weekend, j'ai eu à tenter d'expliquer ma position actuelle face à la vie, dans mes relations interpersonnelles et à l'égard des défis qui sont miens. Et tout ceci dans la perspective de projets de vie à développer dans un avenir pas si lointain.

D'affirmer que je me sentais déjà très sollicitée et assez occupée par mon cheminement de guérison allait de soi. Mais comment l'expliquer pour que l'autre comprenne que je n'ai pas les moyens de m'engager dans des échanges qui demandent la moindre dose d'énergie liés aux tiraillements ou aux malentendus, et ce, sans faire sentir à l'autre un manque de bonne foi de ma part ? Pas si facile.

Je suis restée calme et sereine tout au long de notre discussion, et ouverte aux revendications de mon partenaire, car après tout, s'il ressent le besoin de me faire part de ses tourments, je me dois de l'écouter et de lui accorder toute mon attention. Peu à peu, dans une atmosphère de saine collaboration, nous avancions vers la résolution du différend. Soudain, il m'est venu une image assez juste de ma position actuelle.

Un radeau au milieu de l'océan

Je me trouve seule sur un petit radeau au milieu de l'océan. Parfois, il fait tempête et ça brasse pas mal fort. Je m'accroche de toutes mes forces aux bords de mon unique bouée de sauvetage en priant Dieu et tous mes frères et soeurs célestes de m'accompagner en ce temps de turbulence. Puis, la tempête s'essouffle, le beau temps revient et les eaux se calment. Je puis à nouveau me laisser bercer par le roulis des vagues et rêver du prochain port que j'atteindrai par la grâce de Dieu. Je suis entièrement soumise à sa volonté et c'est avec une foi inébranlable et toute la patience du monde que je dois poursuivre ma tâche jour après jour en attendant que le Ciel me soit plus clément.

Je ne dois surtout pas me laisser flotter nonchalamment, car les défis et les dangers sont nombreux. Chaque jour, une petite colonie d'anguilles de mer viennent tester ma patience en me soumettant à leur panoplie de petits supplices : douleurs dans les mâchoires aux premières bouchées d'un repas, ulcères dans la bouche, croûtes sanguines dans les narines, engourdissement du visage et des mains au contact du froid, fatigue démesurée, irritations et inconforts multiples qui sont tous des effets secondaires des traitements de chimiothérapie.

Pour leur part, les raies venimeuses viennent rôder aux alentours espérant saisir un moment de faiblesse pour m'empoisonner de leur venin et m'entraîner au fond des eaux glacées de l'océan. Ce sont des menaces constantes et bien réelles qui surgissent en temps de découragement. Leur poison est composé de pensées sombres et de tourments envahissants. Seul le moment présent et la foi peuvent m'en préserver.

Les plus dangereux sont les grands requins blancs qui visent rien de moins que la conquête de mon énergie vitale. Un peu comme les vampires sucent le sang de leurs victimes, les requins siphonnent très sournoisement le jus de leurs proies. Sous des allures d'innocentes victimes offensées ou encore de bons samaritains éplorées, ils ont le pouvoir de me vider rapidement de ma précieuse sève de vie si je ne prends pas garde aux dangers qu'ils représentent pour ma survie.

Dans ce périple challengeant, j'ai bien peu de marge de manoeuvre car le radeau est bien petit et je ne sais pas combien de temps encore je dois tenir sans faillir. Il m'est donc impératif de repousser vigoureusement tout agresseur présumé avant qu'il n'ait le temps de faire ses ravages.

Chacun son embarcation

C'est par ce petit radeau que je suis arrivée le mieux à décrire la nature et l'ampleur de mon défi. Et cette image correspondra sans doute au vécu d'autres personnes qui, comme moi, doivent lutter sans relâche pour atteindre leur destination santé. Cela dit, chaque défi, quelle qu'en soit sa nature (perte, deuil, maladie, divorce, etc.), nous propose un voyage au coeur de l'être. Bien que le mode de transport s'impose souvent de lui-même, il nous est toujours possible de l'aménager pour qu'il soit un peu plus confortable et sûr. Et c'est la façon dont on aura choisi de faire face à l'épreuve qui déterminera les conditions du voyage. Tentez donc d'adoucir votre route... car le périple peut être long et ardu, croyez-moi !

Tiens bien

Tiens à ce qui est bon, même si c'est une poignée de terre.
Tiens à ce en quoi tu crois, même si c'est un arbre qui se dresse tout seul.
Tiens à ce que tu dois faire, même si c'est loin d'ici.
Tiens à ma main, même lorsque je t'aurai quitté.

Nancy Wood, tiré de Many Winters (lu dans le Magazine "O" de novembre 2008, p. 47 - traduction libre)

Bon voyage !

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Tu dois avoir peur que ton amoureux place le pied sur ton radeau ?

Croque la Vie a dit…

Cher Anonyme,

Merci à toi d'avoir soulevé le point... car lorsque j'écris des propos de la sorte, je le fais aussi pour une foule de gens qui traversent le même genre d'épreuve et je deviens ainsi la porte-parole de ceux qui n'ont pas les mots pour exprimer leurs limites à leurs proches. C'est aussi à ça que doivent servir mes écrits.

Quant à mon amoureux, il sait que lui voyage dans une chaloupe à moteur et qu'il doit parfois me remorquer. Il joue très bien son rôle. Merci Chéri !