mercredi 17 décembre 2008

Les larmes chaudes du contact divin

Hier soir, je suis allée souper avec une amie de longue date en compagnie de mon amoureux. Nous discutions du sujet traité dans ma chronique d'hier, soit comment nous pouvons tendre la main à une personne en détresse croisée sur la rue.

Un toutou en cadeau

Elle s'est mise à me raconter la fois où elle est venue en aide à une jeune femme qui semblait quelque peu perturbée. Cette femme croisée sur le trottoir tout près de chez elle disait que son rêve c'était d'avoir un toutou et qu'elle n'avait pas d'argent. Mon amie l'a donc invitée à la suivre jusque chez elle pour lui offrir le toutou qu'elle avait sur son lit avec un peu d'argent. La femme très reconnaissante l'a remerciée chaleureusement avant de s'en retourner.

Après avoir refermé la porte, mon amie s'est mise à pleurer à chaudes larmes... L'émotion l'avait envahie soudainement.

L'homme qui marche

Cette histoire m'a rappelé un moment semblable dans ma vie. C'était le matin du 24 décembre 2003 à La Plaine, où j'habitais alors. J'avais eu envie d'offrir mes meilleurs voeux à un homme dans la soixantaine que je croisais très souvent tôt le matin sur le chemin du boulot. Il marchait d'un bon pas en compagnie de son chien, beau temps, mauvais temps, par temps froids comme par temps doux, sous le soleil ou sous la pluie. Son engagement à marcher et son allure dynamique étaient très inspirants et je tenais à l'en remercier à ma façon.

J'ai donc préparé une lettre dans laquelle je lui faisais part de mes sentiments et de ma gratitude que j'accompagnais d'un de mes traditionnels poèmes de Noël. J'ai inséré le tout dans une belle enveloppe rouge avec l'intention ferme de lui remettre en ce matin de veille de Noël... Il fallait que je le voie ce matin-là. Je suis donc partie à mon heure habituelle et j'ai roulé doucement afin d'apercevoir mon ami inconnu. Il pleuvait abondamment et la chaussée était glacée, mais j'étais certaine que le temps n'avait pas découragé l'homme de faire sa marche.

Arrivée à la grande route menant en direction de mon travail, je n'avais toujours pas vu l'homme. J'ai choisi de rebrousser chemin afin de tenter à nouveau de créer cette rencontre importante. Enfin ! Le voilà ! Je m'approche lentement et, en m'arrêtant, j'ouvre ma fenêtre pour l'interpeller. "Monsieur, j'ai une surprise pour vous ce matin. Voici mes voeux de Noël." L'homme surpris a reculé d'un pas. Il était visiblement très heureux de cette lettre de Noël. Nous avons échangé quelques mots, il m'a remerciée puis nous avons poursuivi notre route. Aussitôt que j'ai refermé la fenêtre de mon auto, je me suis mise à pleurer soudainement à chaudes larmes. L'émotion était si forte qu'elle m'a emportée.

Quelques jours plus tard, je recevais une carte de Noël de mon ami, car j'avais pris le soin de lui laisser mon adresse. C'était à mon tour de recevoir un beau cadeau. Il écrivait dans un français impeccable, ce qui m'a un peu étonnée, car son allure lui donnait plutôt l'air d'un vagabond. Peut-être était-il un artiste dans l'âme qui se souciait peu de ce les gens pouvaient penser de lui. Enfin, bref, voici quelques lignes de son message :

"Chère Josée. Depuis dix-sept années que je m'adonne à la marche quotidienne de 4 kilomètres, il y a plusieurs personnes qui, de leur auto, m'envoient la main et me sourient. Si tôt le matin, cela nous fait du bien.

Lorsque mon précédent fidèle compagnon est décédé et que je me suis promené seul pendant un long mois, quelques automobilistes se sont arrêtés pour prendre de ses nouvelles et me témoigner leur sympathie. Mais jamais je n'ai eu un témoignage comme celui du 24 décembre dernier. Quelle belle initiative ! Quelle admirable spontanéité !

J'ai le plaisir de partager ma marche avec mon meilleur ami. J'ai la joie de saluer les gens qui me le rendent et avec un sourire mutuel. Mais aujourd'hui, une gentille fée m'a ouvert sa vitre pour échanger de vive voix son allégresse et me la communiquer. Mon avant-midi en a été bouleversé. On se fait du bien tous les deux.

Que je vous inspire confère un sens à mon existence et à ma capacité de toucher l'autre. Dans vos difficultés, dites-vous bien que je suis avec vous en pensées. J'ai senti et compris votre souffrance qui s'est si bien exprimée dans un français impeccable. Quelle rareté !"

Comme vous pouvez le constater, j'ai conservé cette lettre de mon voisin de quartier. Elle m'a tellement touchée que je l'ai classée au chapitre de mes trésors du coeur et lorsque je la relis, je ressens à nouveau la chaleur de ce contact divin.

Une rencontre d'amour avec Dieu

Comment expliquer la montée si soudaine de l'émotion et la rivière de larmes qui suit ? Pour moi, c'est l'effet de la touche divine qui demeure inexplicable. Pour mieux illustrer ma pensée, je me réfère au témoignage d'une femme qui a vécu une expérience marquante au plus profond de son être. Cette femme est une scientifique (microbiologiste qui a obtenu un doctorat en médecine et qui a aussi étudié la psychiatrie) athée jusqu'au jour où elle a vécu un contact privilégié avec un Dieu d'amour qui est venu lui livrer un cadeau inattendu. Voici ce qu'elle raconte :

"Cet après-midi-là, j'étais assise dans mon jardin. Je laissais mon esprit vagabonder au fil des pages d'un livre que je lisais distraitement. Soudain, en un éclair, ma réalité a basculé. Mon esprit a été saisi de deux certitude : Dieu existe et son essence est amour."

"Son premier geste a été de m'offrir un cadeau : l'assurance d'une vie éternelle. Comme ça, gratuitement, sans condition ! D'instinct, je me suis pliée en deux, sous le coup d'une décharge au plexus solaire au seuil du tolérable. Puis je me suis relevée, saisie de sanglots spasmodiques. Je ne voulais ni ne pouvais contrôler ce flot de larmes de bonheur." (Extraits tirés de Témoins au coeur du monde, sous la direction de Luc Phaneuf, éd. Novalis, 2003, p. 47)

Un pont sur l'infini

Alors, comment expliquer la rivière de larmes ? Je crois que certaines réponses se trouvent dans la suite du témoignage de cette femme. Voici :

"Croire, c'est entrevoir une réalité qui n'est ni celle des sens, ni celle des émotions, ni celle de l'intellect. Cette réalité est si vertigineuse que si elle n'était pas voilée, le cerveau disjoncterait de la même façon que la rétine brûlerait si l'oeil fixait le soleil. La foi permet de saisir sourdement, aveuglément, l'essence de la réalité divine. Elle est le
pont entre l'éternel et l'éphémère, l'infiniment grand et l'infiniment petit. Sans elle, le Dieu de la Bible resterait inerte comme une partition musicale non jouée." (idem, p. 51)

La foi est donc une fenêtre ouverte sur la dimension spirituelle qui nous échappe la plupart du temps et les larmes seraient, à mon avis, le signe que le contact avec Dieu a bel et bien eu lieu.

Quel lien avec l'inconnu croisé au hasard ?

Le lien se situe dans la relation d'amour...

"Or, c'est à une relation d'amour que Dieu aspire. (...) Parce qu'il veut être sûr d'être aimé pour lui-même, et non pour son titre, il se présente sous les traits d'un pauvre." (idem, p. 51)

Dans notre marche vers Noël, cherchons le contact divin dans nos rencontres inattendues. Des surprises nous attendent peut-être.

Aucun commentaire: