jeudi 14 août 2008

La rivière des émotions

(D'abord lire Grugée par la colère paru le 12 août)

Après avoir écrit ma chronique sur la colère qui me gruge, j'ai commencé à lire Les tremblements intérieurs du Dr. Daniel Dufour (éd. de l'Homme, 2003) dans lequel il expose son point de vue sur l'importance de vivre ses émotions pour vivre heureux et en santé. Et il m'est apparu essentiel de revenir sur la question des émotions afin d'apporter quelques précisions. Voyons d'abord ce que le Dr. Dufour en pense.

Le corps est une rivière d'eau vive

C'est en ces mots qu'il introduit la notion du corps qui, en perpétuelle transformation, se fait le messager de notre vécu intérieur, car il en est la vitrine émotionnelle et mentale. Ainsi, la maladie est un message qu'on doit arriver à décoder pour pouvoir envisager une réelle guérison. L'auteur dit : "La maladie, c'est la Peur, la peur de vivre. Elle détruit la vie ou la perturbe. Elle ralentit l'existence ou la stoppe dans les cas extrêmes. La peur d'exister provient de ce que les gens ne croient pas assez en eux, ne s'aiment pas, ne désirent pas vivre dans la Joie et l'Amour." (p. 24)

J'ai été surprise et heureuse de constater que l'approche du Dr. Dufour était centrée sur la dimension spirituelle en ce sens qu'il aborde, au chapitre de la guérison, les notions d'Amour, de joie, de plénitude, de paix, d'harmonie et de connexion avec le Grand Tout (ou la Source). Il insiste sur l'importance de vivre en harmonie avec son Soi profond tout en reconnaissant toutes les richesses "divines" qu'il contient :

"L'homme est un être pétri de qualités, à l'unisson avec le cosmos et qui, par conséquent, possède en son noyau, en son coeur, à l'état plus ou moins embryonnaire ou développé, le savoir universel et, surtout, l'amour de lui-même et des autres. Ce noyau fondamental est inné et éternel, nourri par les profondeurs de l'être. Il est à la fois Savoir, Connaissance et Amour; il est en relation directe avec la Vie." (p. 29)

Ouvrir les vannes

Lorsqu'une rivière est sur le point de déborder, les autorités doivent ouvrir les vannes pour éviter des inondations dévastatrices. Ceci dit, le flot d'émotions qui nous habite doit pouvoir circuler et trouver une porte de sortie afin d'éviter les dégâts. L'auteur dit qu'exprimer sa colère, c'est vital ! "Se laisser aller à vivre ses émotions est la base d'une bonne santé et chacun peut le vérifier pour soi : si on se sent bien, l'énergie circule, 'tout baigne', la réussite et la joie sont alors au rendez-vous." (p. 33) Il ajoute :

"Une colère ressentie mais non vécue ne sera jamais oubliée par notre être profond, même si notre mental, lui semble l'avoir fait. Que devient cette colère une fois enterrée et enfouie au plus profond de notre être ? Elle cherche un endroit où se nicher et continuer son travail de sape. Cet endroit est le plus souvent le foie ou la vésicule biliaire, mais peut aussi être le pancréas, le gros intestin ou le dos (région lombaire et dorsale). (...) Le corps exprimera ces pathologies pour nous rappeler que nous avons posé des gestes faux et fait des choix qui vont à l'encontre de nous-même. (p. 41)"

Plonger dans l'émotion

Avant de pouvoir plonger dans l'émotion pour la vivre pleinement et lui laisser libre court, il est essentiel de la reconnaître d'abord, puis de se donner le droit de l'exprimer. L'auteur insiste sur le fait que la colère n'appartient qu'à celui ou à celle qui la ressent : elle ne doit être exprimée que seule, face à elle-même, pour elle-même ! Il est donc inutile de chercher à cracher le feu de notre volcan à la face d'une personne concernée par cette colère; cela tournerait sans aucun doute en confrontation, ce qui raviverait l'émotion. Le but premier de l'expression de la colère doit demeurer un soulagement.

Le Dr. Dufour précise qu'une émotion EST... elle n'a pas à être justifiée, logique ou rationnellement acceptable. "L'existence du fait d'être en colère est indiscutable: vous l'êtes, un point, c'est tout !" (p. 44)

Une fois que vous vous êtes accordé le droit d'être en colère, il suffit d'y plonger afin de la ressentir pleinement et dans toute sa violence ! "N'ayez pas peur de cette violence, ne la jugez pas, ne tentez pas de vous en justifier ou de l'expliquer, car cela signifierait que vous êtes sorti du ressenti pour remonter à votre mental." (p. 45)

Le bien-être s'installe

L'expression passe par le rejet de l'émotion hors de soi. Elle peut se faire de diverses façons, que ce soit par l'écriture, par un échange avec une personne capable d'écoute et d'accueil, seul dans la forêt ou dans sa douche, dans un gym à bûcher sur un ballon de boxe, etc. L'important, c'est de garder en tête la loi de l'intention : "l'unique but de l'expression de la colère est de se faire du bien à soi-même, et non de faire du mal à l'autre." (p. 44)


"L'émotion remontera du ventre avant d'être rejetée, puis un immense sentiment de soulagement et de paix envahira la personne qui se sera prêtée à l'exercice : une certaine fatigue suivra, qui s'estompera rapidement. Dès qu'elle est exprimée, un bien-être s'installe, car notre corps nous transmet immédiatement un message de félicitations, avec tout l'amour dont il sait faire preuve." (p. 46)

Petite précision au sujet du choix

Dans ma chronique du 12 août, je mentionnais que mon thérapeute m'avait présenté la colère comme étant un choix, ce qui lui donne un caractère rationnel, en quelque sorte. Ainsi, cette notion vient en contradiction avec l'exposé du Dr. Dufour avec laquelle on ne peut être en désaccord.

Perplexe, j'ai été forcée de m'arrêter sur la question afin de mettre de l'ordre dans tout ça, car j'avais la conviction que les deux avaient raison. Il fallait simplement replacer les deux versions dans leur contexte. Voici donc le fruit de ma réflexion :

La colère comme émotion : Comme nous l'avons vu, elle est le résultat d'une réaction involontaire et irrationnelle à un événement quelconque qui vient toucher une corde sensible de notre être (une valeur profonde, une vieille blessure, etc.). Elle s'installe sans invitation et attend que nous lui accordions notre attention pour être comprise, acceptée et vécue. Ce processus se situe, à mon point de vue, sur un plan humain car lié à notre dimension émotionnelle.

La colère comme choix : Choisir entre la colère et l'Amour, c'est ce dont il était question dans mon entretien avec mon guide spirituel... Il fallait donc que cette version du phénomène soit liée à la dimension spirituelle, sans pour autant nier l'émotion déjà présente qui doit trouver une avenue d'expression. M'est venu aussitôt en tête un exemple : le père Emmett Johns, vous connaissez ? On le surnomme Pops, "Le Bon Dieu dans la rue". Depuis 20 ans, Pops sillonne les rues de Montréal à la rencontre des jeunes sans-abri pour leur offrir chaleur, réconfort et nourriture. Il les accueille dans sa roulotte et passe un peu de temps à les écouter et à les servir avec un amour sans condition. (Pour en savoir plus, allez donc faire sa rencontre : http://www.danslarue.com/)

En pensant à Pops, je me disais que cet homme au grand coeur pouvait avoir des milliers de raisons de se mettre en colère face à la détresse des jeunes. Mais ça servirait à quoi ? Ainsi, il a choisi l'Amour, d'être amour et de rayonner de cet amour afin de servir véritablement sa mission auprès d'eux. Voilà en quoi la colère peut être une question de choix.

Plongeons dans l'Amour pour un monde meilleur !

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